Avant d’entrer il faut prendre le temps de faire le tour de l’édifice.
L’église est située dans un espace entièrement clos. Elle est bâtie sur un terrain qui, pour plus de la moitié de sa surface, reste en herbe. Cet état de choses est lié, mais en partie seulement, au fait que le projet immobilier, qui comprenait, comme on l’a vu, d’autres bâtiments, n’a pas été totalement réalisé ; mais pour une autre partie il témoigne d’une volonté : délimiter un espace dédié, un véritable « centre paroissial », selon le vœu de Jean Robert, et sans doute croiser ainsi le thème de terrain sacré tel qu’on le concevait au Moyen-âge. La clôture se compose de quatre éléments. Au sud et à l’ouest, il s’agit simplement de se séparer des constructions voisines, et cette séparation est faite soit par le mur de l’immeuble mitoyen soit par un grillage, ou de banales plaques de ciment tenues par des poteaux. Par contre à l’est et au nord la séparation est assurée par un mur bas en béton avec parement de pierre ; à l’est le mur est percé d’un portail de bois épais à deux battants fixés sur des piliers.
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Notre-Dame de la Paix: un miracle
d'équilibre et de précision |
Ainsi se trouve délimité un véritable parvis : au milieu, une large esplanade en dalles de gravier conduit du portail au porche, en se rétrécissant à peine pour former une sorte de trapèze, espace d’assemblée, d’arrivée des processions, de convivialité à la sortie de la messe ; de chaque côté de cette allée, l’herbe reprend ses droits. Côté sud il y avait trois cyprès que malheureusement il a fallu abattre. Côté nord il y a le campanile, dont nous parlerons plus loin. Les dimensions de l’église surprennent : elle est exactement deux fois plus longue que large, ce qui au premier coup d’œil ne semble pas évident. Pourtant elle mesure bel et bien 35 m de long sur 17,5 de large. On peut rester rêveur devant de telles dimensions : le savoyard qu’était Maurice Novarina raconte en effet que les charpentiers de la vallée d’Abondance ignoraient le système métrique et qu’ils utilisaient comme mesure de base le « bâton », soit 1,66 m : On commandait un chalet de dix bâtons, soit 16,66 m, ou, quand il y avait deux familles, c’était deux fois dix bâtons, c’est-à-dire 33,32 m. Le prix global était fixé selon le nombre de bâtons.[1] C’est cette forme, somme toute indistincte à force de symétrie, que Novarina va devoir orienter.
Et la première décision à prendre est précisément celle de l’orientation : l’une des constantes absolues en matière de construction d’églises est bien que le chœur se trouve à l’est et le portail principal à l’ouest. Ici le plan est inversé ; non pas annulé, mais inversé : il y a une orientation, car l’axe longitudinal de l’édifice est presque strictement est-ouest (bien plus strictement, par exemple, que Notre-Dame de Paris). Mais le chœur est à l’ouest et le porche à l’est. Ceci répond assurément à un impératif fonctionnel : la rue principale passe à l’est, et il aurait été bien peu logique (et assez malheureux du point de vue esthétique) d’inverser l’ensemble du plan, enfermant en quelque sorte l’église derrière la salle paroissiale. Reste que le choix n’a probablement pas été facile, même s’il y a longtemps que l’impératif d’orienter[2] les églises n’est plus guère respecté : non seulement Notre-Dame du Raincy (et sans doute pour les mêmes raisons que Notre-Dame de la Paix) a son chœur à l’ouest, mais une simple promenade dans Paris révèle un joyeux désordre, qu’il s’agisse, de Notre-Dame de Lorette, ou plus simplement du Sacré-Cœur et de la Madeleine, dont les chœurs sont au nord ; et cette désuétude de l’orientation des églises est assez ancienne pour que le chœur de Notre-Dame des Blancs-Manteaux guigne à peine le nord-nord-est. |
Extérieurement, l’orientation est donnée par le porche de l’église : car en elle-même la structure est totalement régulière, et c’est tout naturellement que du côté occidental l’extrémité du vaisseau dessine une sorte de cul-de-four somme toute identique à celui des églises romanes (la voûte en moins, bien sûr). À l’est le cul-de-four est coupé, et le toit réalise une avancée qui fait office de porche. C’est tout ; cela suffit. Le résultat, quand on regarde la façade, est cette étrange impression que l’église tout entière évoque un animal dont la bouche s’ouvrirait, lèvre retroussée, comme ferait un poisson, ou peut-être une baleine. |
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Du point de vue architectural cette sorte d’animalité renvoie une fois de plus à Gaudí : on sait que le Catalan puisait une grande partie de son inspiration dans l’étude de l’anatomie des animaux ; non seulement parce qu’il voulait faire œuvre originale, mais aussi, et peut-être davantage, parce qu’il considérait que les formes choisies par la Nature devaient bien avoir quelques propriétés en termes de solidité, de souplesse et de légèreté. Mais du point de vue théologique, l’idée du poisson évoque immédiatement l’histoire du prophète Jonas, telle qu’elle est racontée dans le livre éponyme de la Bible. Jonas est appelé par Dieu pour prédire leur ruine aux habitants de Ninive. Il refuse d’y aller, s’enfuit, prend la mer et se retrouve jeté à l’eau ; là il est avalé par un poisson[3] qui le retient trois jours avant de le rejeter sur la grève. Les premiers penseurs chrétiens ont vu là une prémonition de la mort du Christ, qui sera retenu au tombeau pendant trois jours[4]. Toute église est réputée recéler le Christ, et en ce sens elle est à l’image du poisson qui retint Jonas. |
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Entrer dans l’église, c’est pénétrer dans un monde différent, autre, hors du temps ordinaire. C’est ce que disait déjà l’église romane : la voûte en plein cintre enferme une bulle de milieu divin, la multiplication obsédante du cercle céleste supportant le carré de la terre réaffirme, au-delà des apparences changeantes du monde, la permanence de la Vérité. L’église romane est acte de foi, elle se donne comme le lieu où l’on voit l’essence du réel. Par contraste la voûte de l’église gothique est fendue, c’est celle des cieux qui se sont ouverts pendant le discours du diacre Etienne, et ses vitraux proposent comme l’hallucination du monde qui vient : l’église gothique est un belvédère, l’église romane est un lieu où l’on voit, l’église gothique est un lieu d’où l’on voit. De ce point de vue, Notre-Dame de la Paix est imprégnée de l’esprit roman : c’est un lieu où il faut entrer, un lieu par lequel il faut se laisser happer, un lieu qui a un secret à confier.
Mais avant de songer à entrer il faut jeter un coup d’œil à l’extérieur, et contempler un moment cet étrange édifice dépourvu de tout angle, comme pour mieux manifester qu’on ne peut le saisir, comme pour mieux montrer sa volonté d’enclore son mystère. Les exemples d’églises rondes ne manquent pas, que ce soit dans les pays nordiques, au Portugal, voire en Éthiopie, mais qu’il suffise de citer, plus près de nous la cathédrale d’Évry (Essonne).
Une étrange pulsation (Photo: Michel Cavey-Lemoine) |
Il faut se laisser fasciner par le contraste entre cette rotondité qui, sûre d’elle-même, proclame sa permanence et ce toit qui se montre si ostensiblement posé en équilibre sur ses deux V inversés ; pour peu on le verrait, précisément, osciller autour de son axe. Ainsi se trouve manifesté que si, comme l’église romane, Notre-Dame de la Paix renferme ses trésors, son toit, comme celui de l’église gothique, ne demande qu’à s’envoler pour mieux mettre en relation le monde d’en bas et le monde d’en haut. Mais d’autre part ce balancement introduit une sorte de pulsation qui renforce l’étrange impression d’animalité qu’on pressentait déjà. |
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Côté nord, la moitié du mur est presque totalement fermée, jusqu’au point le plus bas du toit ; on ne compte que sept petites ouvertures destinées notamment à éclairer la chapelle de la Vierge. Là on peut observer de près l’un des systèmes de poteaux qui soutiennent la voûte. C’est l’occasion d’observer la manière dont Novarina a résolu la question de l’écoulement des eaux pluviales. Une solution banale aurait été d’installer des gouttières, mais outre ceci aurait manqué de grâce, la forme même du toit de l’église aurait grandement compliqué l’opération. L’idée de Novarina a été d’utiliser précisément cette forme, dans laquelle les eaux tendent naturellement à se concentrer aux deux points bas de la selle de cheval ; il suffisait dès lors d’entourer le toit d’un ourlet de ciment, de sorte que les eaux ne tendent pas à sortir par les bords, et d’installer au-dessus de chaque poteau vertical une gargouille qui conduit les eaux de pluie jusqu’à la verticale d’un bassin dans lequel elles tombent en chute[5]. Ce système est encore en œuvre aujourd’hui, il est simplement regrettable que les bassins soient hors d’usage.
Juste au droit du poteau vertical se trouve une porte à deux battants, dans la position habituelle d’un portail nord, mais qui ne peut guère servir que d’issue de secours : non seulement elle donne sur la pelouse, de sorte que pour sortir de l’enclos il faut retourner à l’est, du côté du porche, mais encore l’ouverture ouvre directement sur le poteau. Quand on dépasse la porte on se trouve face au mur nord-ouest, qui est percé d’une vaste verrière rectangulaire occupant un bon tiers de sa surface. On aperçoit ensuite l’abside, solide point de repère dans cette architecture tellement inusuelle, même s’il faut faire quelque peu abstraction de la chapelle et de la salle paroissiale qui viennent en troubler la sérénité.
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La grande verrière (Photo: Michel Cavey-Lemoine) |
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Il faut revenir au porche pour se glisser côté sud, où l’aspect est radicalement différent : le mur est criblé, en haut de meurtrières, en bas d’ouvertures carrées, qui correspondent à autant de vitraux destinés à éclairer la nef ; on songe à des ouïes de poisson, mais aussi à des sabords ; en tout cas se propose là un saisissant contraste entre le hiératisme de la grande verrière au nord et le grouillement des ouvertures au sud. Remarquons simplement que de ce côté le bassin de réception des eaux de pluie s’entoure d’un jardinet qui mériterait une mise en valeur s’il n’était si laidement proche des constructions voisines. On bute ensuite sur le mur de la sacristie.
La question des pierres revêt à Villeparisis une importance majeure.
On a vu en effet qu’une des grandes questions de l’architecture sacrée du XXe siècle aura été celle du béton. Et cette question n’aura pas manqué de tarauder Novarina : il avait fait ses classes chez Auguste Perret, pour qui, on s’en souvient, l’église du Raincy aura été un manifeste en faveur du béton ; et sa coopération avec Laffaille l’orientait tout naturellement vers l’usage de ces technologies.
Mais alors pourquoi avoir voulu utiliser des pierres ? C’est là un parti d’autant plus étrange que dans la conception même de la voûte en paraboloïde hyperbolique la poussée s’effectue uniquement au niveau de l’arc central, et elle est reçue par les seuls piliers en V renversé ; en d’autres termes, contrairement à ce qui se passe dans une église, et surtout une église romane, les murs ne subissent aucune poussée : ils ne sont pas porteurs, et on peut dire qu’en somme ils ne servent à rien. Dans ces conditions le choix d’un matériau aussi noble (et coûteux) que la pierre, puisqu’il ne répond pas à une nécessité organique, ne peut trouver son explication que dans la symbolique. Et on peut trouver aisément deux orientations majeures.
La première orientation est à coup sûr une prise de position quant à la question du béton : la voûte mince réalisée par Laffaille est une prouesse technique, surtout replacée dans le contexte de l’époque. Mais c’est, il est vrai, une prouesse qui ne se voit guère, et à Notre-Dame de la Paix le béton n’affleure tel quel que dans le campanile, les deux ensembles de poteaux soutenant la voûte et, intérieurement, à la tribune ; en somme on pourrait dire que Novarina a voulu donner au béton une place purement fonctionnelle : c’était le seul matériau qui permît de réaliser la voûte. Pour tout le reste il a tenu à revenir à la pierre.
La seconde orientation est probablement à rechercher dans la spiritualité de Jean Robert et Jean de Mallmann dont les propos à plusieurs reprises font allusion à ces pierres vivantes dont l’Église est bâtie ; idée qui résonne d’autant plus fort que, comme on l’a vu, les pierres ont été pour une grande part achetées par les paroissiens de Villeparisis, de sorte que c’est réellement un peu d’eux-mêmes qu’ils ont mis dans ces murs |
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Toujours est-il que la présence de la pierre à Notre-Dame de la Paix est particulièrement éloquente, et ce d’autant plus qu’il s’agit de grosses pierres. Très schématiquement, et en oubliant qu’à l’époque les murs sont fréquemment constitués d’un parement extérieur et d’un parement intérieur enfermant un matériau de remplissage, on distingue dans l’architecture médiévale trois types de murs[6] :
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Les murs de Notre-Dame de la Paix sont en grand appareil : il s’agit de la technique la plus prestigieuse. Par contre il est assez émouvant de noter que les pierres sont taillées de manière extrêmement grossière ; alors que les bâtisseurs médiévaux s’appliquaient à produire des pierres aussi lisses que possible, alors que les architectes du XIXe siècle utilisaient des scies mécaniques (au point que le plus simple pour repérer les restaurations est d’observer la régularité des traits sur les pierres et la présence de ciment), à Villeparisis on nous montre des pierres taillées à la boucharde, cette sorte de marteau muni d’aspérités qui ne peut que dégrossir la forme et en aucun cas produire une pierre lisse ; d’ailleurs à notre époque la boucharde est utilisée plutôt à créer des irrégularités à la surface d’une pierre que le sciage mécanique a rendue trop lisse. Mais ici les choses vont plus loin encore : car même l’ouvrier le plus maladroit, équipé de la boucharde la plus grossière, arriverait à un meilleur résultat que ce que nous montrent les pierres de Notre-Dame de la Paix ; Ce qui est donné à voir ici c’est en somme un véritable déni de technologie, qui vient renforcer le contraste avec l’audace de Laffaille ; certes la rugosité de la surface sert aussi à accrocher la lumière ; mais nous reparlerons de cette question de la lumière.
Les pierres
de Notre-Dame de la Paix |
Revenons maintenant devant l’église, et observons le campanile. Car il ne s’agit pas d’un clocher : un clocher est une construction prise dans la structure même de l’église, que par sa masse même il contribue à renforcer ; un campanile est un module séparé de l’édifice principal : la Tour de Pise est un campanile. En principe un campanile est moins coûteux à construire.
Dans le projet d’origine le campanile devait se situer à l’angle sud-est du terrain. Mais faute de moyens il n’a pu être édifié en même temps que l’église. D’autre part le projet initial prévoyait une construction très différente[7], faite au nord et au sud de deux grandes lames en forme de triangles concaves, d’environ trois mètres à la base et d’une quinzaine de mètres de haut, possibles variations sur le thème du poteau-coque ; leur intervalle est aurait été laissé à claire-voie pour recevoir les cloches.
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Le campanile actuel, élevé en 1992, est une déclinaison très modifiée de ce thème : on retrouve l’idée de lames adossées par leur concavité ; chaque lame est faite de sept éléments de béton dont les traces de coffrage sont laissées apparentes, reliés deux par deux par leur concavité au moyen de paires d’entretoises de béton. Les cloches sont installées sur les quatrièmes, cinquièmes et sixièmes éléments ; les septièmes éléments se redressent à l’est comme des voiles de navire, renforçant l’impression d’élancement, et l’ensemble est coiffé d’un mât supportant une croix, mais aussi un coq traité de manière très réaliste. Rappelons d’un mot que ce coq n’est en rien le coq gaulois : le plus ancien coq de clocher connu se trouvait en Italie, à Brescia. Il est probable que si le coq était sur les clochers, c’est parce qu’il annonce le lever du soleil, qu’il s’agisse du soleil de la Résurrection ou plus simplement encore du soleil au lever duquel il convenait de se réunir pour prier : cloche et coq disaient, l’une par le son l’autre par l’image, la même chose. |
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Les cloches ont été installées en 1993. Fondues par les Ets Paccard à Annecy, elles donnent, de bas en haut, le la, le do dièse et le mi, soit un accord de la majeur. La cloche « la » s’appelle Colombe et pèse 450 kg pour un diamètre de 0,9 m ; la cloche « do dièse » s’appelle « Solange », et pèse 225 kg pour un diamètre de 0,715 m ; la cloche « mi » s’appelle « Emmanuel-Marie » et pèse 155 kg pour un diamètre de 0,608 m. Toutes trois ont été offertes par d’anciens élèves d’HEC, respectivement Bernard Clerc, Jean Robert et Hubert Cloix. Au pied du campanile, un cylindre de granito noir renferme dans une urne funéraire les cendres du Père Jean Espinasse, et une plaque inclinée lui rend hommage en évoquant la naissance de Notre-Dame de la Paix. |
Regardons maintenant le porche.
Sous ses airs d’apparente simplicité, il reprend les éléments de tout portail médiéval :
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Il y a d’abord un portail, qui s’ouvre à deux battants. Il a été réalisé par Lafon, menuisier villeparisien, en sapelli, qui est une variété d’acajou, de 80 mm d’épaisseur, assemblé à l’antique par des gros clous de fer forgé, selon les techniques en usage avant l’avènement de la tréfilerie industrielle ; la porte nord est de même facture. De part et d’autre l’avancée du mur réalise l’équivalent des ébrasements des portails gothiques ; elle est ici laissée à nu. |
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Au-dessus de la porte il y a un linteau, dont la section pentagonale, dite « en bâtière », est parfaitement classique. Dans l’architecture romane ce linteau est volontiers sculpté ; ici la sculpture se résume à une inscription de fer : « Notre Dame de la Paix ».
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Le linteau supporte un tympan. Ici également, dans le monde roman la sculpture serait de mise. Elle est remplacée par neuf ouvertures ; une telle option n’est pas révolutionnaire : après tout les roses occidentales de Chartres, Paris, Laon remplissent la même fonction. Ce qui intrigue ici, c’est qu’il existe à la partie haute du tympan trois grandes meurtrières, ce qui ne peut manquer de faire penser à la Trinité : les exemples romans foisonneraient. Mais si on accepte cette proposition, alors on se trouve en difficulté pour dire ce que peuvent symboliser les six autres ouvertures. Mieux vaut donc, sauf à découvrir que Novarina en a dit quelque chose, ne pas s’aventurer trop loin : dans la symbolique tous les chiffres ont une signification, de sorte qu’il est toujours possible de trouver une explication à leur emploi ; cependant l’idée que le six est le chiffre de la puissance, et notamment de la Création que Dieu accomplit en six jours permettrait de mettre cette Création en rapport avec la Trinité qui la surmonte ; à moins qu’ensemble ces neuf fenêtres n’évoquent, comme si souvent, le chœur des anges ; tout de même on préférerait un lien plus clair avec la Vierge Marie, à moins de se contenter du fait que le chiffre neuf exprime également la continuité, la persévérance et la plénitude.
Le reste du porche est constituée par les avancées des deux murs et du toit, qui réalisent un abri bien davantage symbolique qu’efficace, mais qui n’en est pas moins très fortement affirmé.
À droite on remarque la première pierre, avec cette simple inscription : « Notre Dame de la Paix, 30 janvier 1955, première pierre ». Le moellon est creux, et dans sa cavité a été placé un parchemin, dont le contenu n’a pas été divulgué. | La première pierre (Photo: François Gagnepain) |
Le seul élément sculpté de cet ensemble n’est pas en pierre. C’est, fixée sur le coté sud du porche, une vierge à l’enfant en bois brut, réalisée par Rey. La Madone, strictement de profil, est assise ; elle tient sa tête de sa main droite, dans une posture qui, curieusement, est bien plus souvent assignée à Joseph, chez qui elle fait allusion à son doute après la conception de Jésus ; ici on a plutôt le sentiment que la Vierge, tout simplement, s’endort. De son bras gauche, terminé par une main immense, elle retient à peine son bébé qui, lui aussi, dort contre son sein. Les corps sont à peine ébauchés, de l’enfant on ne distingue que la tête, auréolée d’une coiffure de moine, et le haut du torse, sans même que soient seulement marqués les bras ; le reste du corps se fond dans les plis du vêtement de la Vierge, plis non point agités du souffle divin comme il était usuel à l’époque romane, mais au contraire tout juste suggérés, tout juste nécessaires, tout comme le voile qui drape sa tête, laissant juste deviner des cheveux sagement peignés. L’ensemble irradie la paix, la confiance, l’abandon. Ce n’est pas la Vierge de Lourdes, aux mains ouvertes et au visage appelant. Ce n’est pas la femme de l’Apocalypse :
on se trouve bien plus proche de l’ambiance du Psaume :
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Notre-Dame de la Paix (Photo: Michel Cavey-Lemoine) |
Mais il est temps d’entrer dans l’église.
[1] Il est peu probable que ce soit là la raison pour laquelle on appelait « bâton » le million de francs ; dommage.
[2] Il est à peine utile de rappeler que le mot « orienter » vient précisément de là : en principe l’église est tournée ad orientem.
[3] Un poisson, et non une baleine : c’est Pinocchio qui sera avalé par une baleine…
[4] Nous verrons plus loin d’autres connexions entre le Christ et le thème du poisson.
[5] Et là aussi, tout comme à Annecy, Novarina met en œuvre ce thème de l’eau qui lui est particulièrement cher.
[6] En fait il y en a bien plus, mais peu importe ici.
[7] Une photo est visible à http://archiwebture.citechaillot.fr/awt/vignette.html?id=FRAPN02_LAFBE_document-1650&contour-page=non
[8] Apocalypse, XII, 1-2.